« Le masculin l’emporte sur le féminin »
Est-ce qu’on peut imaginer ce que cette phrase, assénée à chaque accord “malencontreux”, peut avoir de néfaste dans la conception que les enfants se forgent de leur propre personne, selon qu’ils sont filles ou garçons, et sur l’idée qu’ils se font du monde en général ? Comment lutter pour l’égalité des citoyen·nes quand on leur prêche cette règle inique dès leur plus jeune âge ?
Eh bien non, le masculin ne l’emporte pas sur le féminin.
Dans une pétition en cours, 314 enseignantes et enseignants s’engagent à ne plus appliquer cette règle.
Je suis écrivaine, la langue est mon outil. Quand j’écris, je pèse les mots, consciente que l’effet d’une phrase ne sera pas le même selon le terme choisi. Jusque-là, en bonne élève formatée, j’appliquais cette règle de l’accord sans y penser. Moi qui me pensais féministe… Mais les réflexions d’Éliane Viennot m’ont éclairée sur cet affront grammatical. Si je percevais bien la volonté de cantonner les femmes dans certains domaines, je n’avais pas réfléchi à ce côté-là de la force… Notre façon de “dire les femmes” n’est pas neutre… Des noms de métiers qui n’existent pas au féminin, la dévalorisation de l’acception féminine d’un grand nombre de termes… et jusqu’à cette règle grammaticale inique, tout fait sens. Et toujours dans le même sens.
Je suis écrivaine et j’écris des livres “jeunesse”. Il me semble d’autant plus important de lutter contre cette règle infâmante du “masculin qui l’emporte sur le féminin” que mes livres sont lus par des enfants et des adolescents.
J’ai signé la pétition de soutien à ces enseignants, à ces enseignantes.
À mes éditrices, mes éditeurs, à mes lectrices et mes lecteurs, j’annonce donc que j’utiliserai dans mes textes à venir la règle de proximité.
Ainsi les histoires et les livres seront beaux comme les livres et les histoires seront belles.