De la péniche au moulin
Octobre 2020. Invitées en résidence par l’association Caranusca, avec Géraldine Alibeu, on partait lire Jean-Kevin sur une péniche… Le bateau ayant quelques hoquets, la formidable équipe de Caranusca a aussitôt rebondi pour remplacer cette navigation par une immersion dans les ateliers des faïenciers de Sarreguemines.
Et nous voilà, Jean-Kevin sous le bras, dans le très beau moulin de la Blies. Ce lieu est un écrin paradisiaque autour des ruines d’une faïencerie, une de ces nombreuses usines désormais disparues. Restent un musée des techniques faïencières, des ateliers pédagogiques, un jardin merveilleux, des pierres, le bruissement des feuilles sur l’eau de la Blies, le cri d’un oie égyptienne, son envol… Et toutes ses photos, ses regards d’ouvrières, d’ouvriers, ces regards d’enfants aussi.
Les mains dans la terre
Au-delà de l’immersion dans ces traces du passé, j’avais besoin du contact de mes mains avec la terre, les couleurs… avec ce qui faisait le quotidien de ces ouvrières, de ces ouvriers. Bien sûr, ce n’est qu’une impression fugitive, un embrun venu du passé de ces hommes, de ces femmes, de ces enfants, de leur vie à l’usine. Aujourd’hui, le végétal court harmonieusement sur les ruines : plus de péniche pour apporter les blocs de pierre, plus de locomotive ni de wagon pour emporter les assiettes et les soupières. Plus de poussière de charbon ou de minéraux, plus d’odeurs. Aujourd’hui, tout est silence quand hier les meules écrasaient les blocs de grès, quand les roues d’acier tournaient pour patouiller la pâte à céramique qui était ensuite tournée, modelée, peinte, cuite, émaillée, recuite… Oui, j’étais bien loin du bruit et des cadences infernales qui rythmaient leur vie d’ouvriers, mais j’ai pu un instant, un court instant, respirer un peu de leur histoire.
Merci à Jean Wary pour sa patience, son amour de la céramique et sa générosité à partager son savoir faire. Merci à Delphine pour ses couleurs. Et à l’atelier du musée pour m’avoir si gentiment ouvert ses portes.
Géraldine Alibeu
Sans oublier Jean-Kevin !
Pour Jean-Kevin, pas de lecture tatouée pour raison de Covid, mais deux lectures dessinées. Merci encore à l’équipe de Caranusca, Claire et David (qui signent la vidéo et la plupart des photos de cet article), et à Manu au son et à la lumière.